Des paralytiques retrouvent l’usage de leurs mains grâce à un dispositif de stimulation externe

Publié le 24 Mai, 2024

A l’aide d’un dispositif de stimulation non invasive de la moelle épinière, des personnes paralysées ont retrouvé l’usage de leurs mains.

L’ARCex est un petit stimulateur externe relié à des électrodes placées sur la peau des patients à proximité de la zone où la moelle épinière a été lésée. A l’aide de celles-ci, il délivre une stimulation électrique à la moelle épinière. Le dispositif a été conçu par Onward Medical, une société créée par Grégoire Courtine, neuroscientifique à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).

Des améliorations importantes

Un essai clinique a été mené sur 60 patients porteurs de handicaps. Selon Igor Lavrov, neuroscientifique à la Mayo Clinic dans le Minnesota, aucun essai n’avait jusque-là été réalisé dans autant de centres de réadaptation, et sur autant de patients.

Les participants ont bénéficié de deux mois de rééducation physique, suivis de deux mois de rééducation associée à la stimulation. A l’issue des quatre mois d’essai, 72% des participants, soit 43 patients, ont constaté une amélioration de la force et de la fonctionnalité de leurs mains ou de leurs bras. 90% des patients ont constaté une amélioration d’au moins un de ces éléments. 87% ont, par ailleurs, fait état d’une amélioration de leur qualité de vie. Le 20 mai, les résultats ont été publiés dans la revue Nature Medicine [1].

Une technologie non invasive

Contrairement aux implants, le système de stimulation externe ne nécessite pas d’intervention chirurgicale (cf. Neuralink : malgré les dysfonctionnements, la FDA autorise l’implantation d’un deuxième patient). Or, « de très nombreuses personnes ne sont pas intéressées par les technologies invasives » indique Edelle Field-Fote, directrice de la recherche sur les lésions de la moelle épinière au Shepherd Center. Un dispositif externe devrait en outre être moins cher. Le prix de l’ARCex n’a cependant pas encore été déterminé, mais l’objectif est d’être « accessible ».

Les effets du dispositif pourraient par ailleurs perdurer même lorsque le stimulateur ne fonctionne pas. Des études menées sur des animaux suggèrent en effet que la stimulation active les fibres nerveuses restantes et, avec le temps, favorise la croissance de nouvelles connexions.

Pour les personnes qui ont encore une connexion entre le cerveau et la moelle épinière en dessous de leur lésion, la stimulation semble faciliter les mouvements volontaires en rendant les nerfs plus susceptibles de transmettre un signal. La stimulation ne fonctionnera en revanche pas chez les personnes n’ayant plus cette connexion.

« C’était extraordinaire »

Melanie Reid, paralysée depuis quatorze ans suite à une chute de cheval, est l’un des patientes sur qui le dispositif a été placé. Grâce à celui-ci, elle a retrouvé le contrôle de sa main gauche. Elle peut désormais l’utiliser pour se faire une queue de cheval, naviguer sur une tablette, ou détacher une ceinture de sécurité.

Melanie Reid dit être étonnée par la quantité de choses qu’elle a pu retrouver. « Après 14 ans, on se dit que l’on est là où l’on est et que rien ne va changer » témoigne la patiente qui a retrouvé de la force dans sa main gauche. « C’était extraordinaire » de découvrir ces changements se réjouit-elle. « Tout le monde pense qu’après une lésion de la colonne vertébrale, tout ce que l’on veut, c’est pouvoir marcher à nouveau. Mais si vous êtes tétraplégique ou quadriplégique, ce qui compte le plus, c’est d’avoir des mains fonctionnelles » souligne Melanie Reid.

Sherown Campbell, un autre patient ayant participé à l’essai, explique, lui, que le dispositif l’a aidé à améliorer sa vitesse de frappe, à cuisiner, à écrire, et à faire d’autres tâches améliorant sa « qualité de vie ».

Le dispositif pourrait être approuvé d’ici la fin de l’année aux Etats-Unis. L’Europe pourrait ensuite suivre.

La société Onward Medical développe par ailleurs des dispositifs implantables, capables de délivrer une stimulation plus forte et plus ciblée, qui pourraient être utilisés chez les personnes atteintes de paralysie complète. L’an prochain, la société souhaite démarrer un essai pour ces dispositifs.

 

[1] Chet Moritz et al, Non-invasive spinal cord electrical stimulation for arm and hand function in chronic tetraplegia: a safety and efficacy trial, Nature Medicine (2024). DOI: 10.1038/s41591-024-02940-9

Sources : MIT, Cassandra Willyard (20/05/2024) ; MedicalXpress (20/05/2024) – Photo : Pixabay

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