Charcot : une piste de traitement pour améliorer l’espérance de vie

Publié le 28 Juin, 2024

Le 21 juin, à l’occasion d’une conférence donnée pour la journée mondiale de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), David Devos, neurologue, professeur de pharmacologie et chercheur en neurosciences au CHU de Lille, a présenté, avec son équipe, les résultats précliniques[1] d’une piste de traitement visant à rallonger considérablement l’espérance de vie des patients atteints de SLA, ou maladie de Charcot[2] (cf. Maladie de Charcot : le Sénat doit examiner une proposition de loi pour améliorer la prise en charge).

Améliorer l’espérance de vie des patients

Chaque année près de 1600 nouveaux cas sont diagnostiqués en France et chaque jour, trois personnes en meurent. L’espérance de vie des patients porteurs de cette maladie est de trois à cinq ans après l’apparition des symptômes. Pour le moment, un traitement, le riluzole, permet de ralentir la progression de la maladie conduisant à un « gain de vie de 3 mois ou plus », « ce qui reste insignifiant quand il vous reste 3 ans à vivre » commente David Devos (cf. Maladie de Charcot : un nouveau traitement approuvé au niveau européen).

La nouvelle technique qu’il a mise en place utilise la biothérapie pour injecter le contenu des plaquettes sanguines, dépourvues de leur membrane externe et issues de donneurs sains, directement dans le cerveau des patients (cf. Maladie de Charcot : combiner « la technicité et l’humanité» au lieu de légaliser l’euthanasie). Elles se diffusent alors dans le système nerveux, et y libèrent des facteurs neurotrophiques impliqués dans la croissance et la survie des neurones. Le traitement permet ainsi de ralentir la destruction des motoneurones indispensables au contrôle musculaire.

Cette approche est originale « parce qu’elle exploite le potentiel des plaquettes à réparer les tissus », explique Sévérine Boillée, chercheuse à l’Inserm, à la tête de l’équipe Causes de la SLA et mécanismes de la dégénérescence motoneuronale à l’Institut du Cerveau, qui n’a pas participé à l’étude. « L’autre point fort est qu’une injection locale au niveau du système nerveux central permet de bénéficier au maximum des effets des facteurs neurotrophiques », poursuit-elle.

Vers des essais cliniques sur l’homme

Les résultats précliniques démontrent une augmentation de près de 130 % de l’espérance de vie de souris malades par rapport à d’autres non traitées. Au vu de ce succès, des essais cliniques devraient débuter chez 12 patients lillois en 2027. « Concrètement, nous poserons, sous la peau de l’abdomen des patients, une pompe qui contient le traitement et qui est reliée à un cathéter inséré dans le tissu cérébral, dont le rôle est d’assurer l’acheminement des dérivés plaquettaires à l’intérieur du cerveau », explique le Pr Devos. Les chercheurs devront aussi identifier les biomarqueurs sanguins ou issus de l’imagerie médicale qui permettront d’évaluer et de quantifier l’efficacité du traitement sur la progression des symptômes.

Malgré les résultats encourageants sur les rongeurs, « des résultats précliniques ne permettent en rien de garantir une telle efficacité chez l’humain, ni même une absence d’effets secondaires indésirables », met en garde Sévérine Boillée. Une infection cérébrale due à du sang contaminé, ou bien un risque de coagulation pourraient s’avérer dangereuses pour le patient. Mais, les différentes étapes préalables de détoxification des plaquettes en laboratoire devraient permettre d’éviter ces risques (cf. Implant cérébral : un nouvel essai chez un patient atteint de la maladie de Charcot).

 

[1] Flore Gouel, Kelly Timmerman, Philippe Gosset, Cedric Raoul, Mary Dutheil, Aurélie Jonneaux, Guillaume Garçon, Caroline Moreau, Veronique Danel-Brunaud, James Duce, Thierry Burnouf, Jean-Christophe Devedjian, David Devos, Whole and fractionated human platelet lysate biomaterials-based biotherapy induces strong neuroprotection in experimental models of amyotrophic lateral sclerosis, Biomaterials, Volume 280, 2022, 121311,
https://doi.org/10.1016/j.biomaterials.2021.121311

[2] La maladie de Charcot ou SLA est une maladie neurodégénérative incurable causée par la destruction progressive des motoneurones qui contrôlent les muscles de la motricité volontaire, la parole, la déglutition et la respiration.

Source : Le Figaro, Elisa Doré (26/06/2024) – Photo : iStock

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