Le 16 septembre, le journal Le Monde accusait la fondation Jérôme Lejeune d’« entraver » la recherche française [1]. Des accusations infondées, comme elle le détaille dans le droit de réponse qui a été publié. Gènéthique le reproduit ci-après.
La Fondation n’« entrave » pas la recherche française. Au contraire, la Fondation Jérôme Lejeune est un acteur majeur de la recherche française. Elle a financé à ce jour plus de 850 projets de recherche depuis 1997, dont 350 en France, représentant un investissement de 70 millions d’euros. Plus d’un tiers de son budget est consacré à la promotion de la recherche scientifique, une recherche légale, éthique et respectueuse de l’Homme.
Son conseil scientifique sélectionne des projets de qualité qui prospèrent et permettent notamment de lancer la carrière de jeunes chercheurs. Actuellement, la Fondation finance une recherche clinique sur un inhibiteur, déjà en phase I, qui sera directement bénéfique pour les patients. La récente publication, en août 2024, dans le Lancet Regional Health – Europe des résultats de l’étude Respire 21, menée avec l’hôpital Necker-Enfants malades et entièrement soutenue et financée par la Fondation, suffit à montrer son efficacité à faire avancer la recherche au profit des personnes porteuses d’une déficience intellectuelle d’origine génétique et de leurs familles. Pour la première fois, une recherche clinique confirme scientifiquement l’intuition qu’a toujours portée le Pr Jérôme Lejeune : il est possible d’améliorer le développement cognitif des enfants avec trisomie 21.
« Aucun domaine n’est exclu du droit, supérieur à la loi, ou exempté de tout contrôle juridictionnel »
Si « épée de Damoclès » il y a au-dessus de la tête des chercheurs, ce n’est que l’autorité de la loi. Ce qui « entrave » certaines recherches, ce sont des interdits légaux. La recherche scientifique, en particulier lorsqu’elle porte sur l’embryon humain, est soumise à un cadre législatif censé protéger l’être humain. Et c’est au juge qu’il revient de vérifier la légalité des décisions prises par l’Agence de la biomédecine. Son office est ici totalement démocratique et il n’est absolument pas permis d’en douter. Aucun domaine n’est exclu du droit, supérieur à la loi, ou exempté de tout contrôle juridictionnel.
La Fondation conteste exercer un « harcèlement procédurier » pour des « bricoles » : l’abus de droit est une faute qui n’a jamais été caractérisée par aucun juge, qui admet d’ailleurs les pourvois de la Fondation. Elle exerce son droit de recours, qui est un droit fondamental et s’est toujours vue reconnaître un intérêt à agir dans la protection de l’embryon, justement parce qu’elle finance la recherche. Le Conseil d’Etat pourrait déclarer ses pourvois irrecevables, mais au contraire la plus haute juridiction estime que ce sont des questions de droit inédites qui lui sont présentées. Il ne s’agit pas de « bricoles » mais de conditions posées par le législateur qui encadrent la recherche sur l’embryon, être humain qui nécessite une protection particulière. Le juge s’entoure d’ailleurs régulièrement d’avis scientifiques experts, afin de l’aider à trancher. Certes, si la Fondation Jérôme Lejeune ne faisait pas de recours, il n’y aurait pas de contentieux. Ni de jurisprudence donc. Et la loi resterait floue et mal appliquée, dans un domaine qui nécessite pourtant une grande exigence, précisément parce que l’on touche à l’être humain. La Fondation protège l’embryon et le respect de l’Etat de droit en France.
Des recherches annulées
Le juge a d’ailleurs donné raison à la Fondation Jérôme Lejeune dans 16% des recours déposés. C’est une statistique tout à fait dans la moyenne habituelle des tribunaux administratifs. Ce qui a conduit le juge à annuler des recherches mettant en œuvre par exemple la technique de l’embryon à 3 parents, ou encore le tri eugénique des embryons trisomiques in vitro, via le DPI-A, qui est un procédé totalement interdit en France : l’autoriser reviendrait en effet à décider collectivement de la suppression des embryons porteurs d’une anomalie chromosomique. C’est une dérive eugénique que le parlement français a explicitement refusé de légaliser lors de la loi bioéthique de 2021, à la demande expresse de Mme Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé (cf. Extension du diagnostic préimplantatoire : pour Agnès Buzyn, « la décision éthique la plus difficile du projet de loi »). Autant de procédés dangereux pour l’Homme et prohibés par le législateur.
La Fondation Jérôme Lejeune dénonce toute sélection discriminatoire et eugénique fondée sur le patrimoine génétique, quelle qu’en soit la forme. Néanmoins, elle n’intente pas d’action en justice contre tous ces procédés, puisque le législateur en a approuvé certains, quoiqu’en pense la morale. La Fondation se fait la voix de la démocratie, pas de la morale, encore moins d’une religion.
La volonté de faire respecter les lois bioéthiques
Le budget alloué par la Fondation à ces actions judiciaires est incomparablement plus modeste que les budgets impliquant des fonds publics alloués aux projets de l’Agence de la biomédecine. Il est normal que l’utilisation des fonds publics puisse être de ce fait contrôlée par le juge administratif. La Fondation utilise légitimement les fonds privés qu’elle reçoit puisqu’elle défend le respect de la loi sous le contrôle du juge qui n’a jamais jugé ses recours abusifs.
La Fondation n’affirme aucune contre vérité. Elle est libre d’exprimer son opinion et n’insulte personne, ni les chercheurs, ni la recherche. Sa seule volonté est de faire respecter les lois bioéthiques qui encadrent la recherche sur l’embryon, déjà dépourvu de nombreuses protections alors qu’il est membre à part entière de l’espèce humaine. Et elle le fait de manière légale, puisque la loi permet à tout tiers de faire vérifier par le juge administratif la légalité des décisions administratives qui touchent à son intérêt légitime. C’est ici la protection de l’espèce humaine et du bien commun de notre société qui est en jeu.
Enfin, les recours exercés par la Fondation sont plutôt une perspective rassurante pour tout citoyen soucieux du respect des lois et de la protection de la dignité de l’être humain dès sa conception, inscrite dans les textes français, notamment dans l’article 16 du code civil, créé par la première loi de bioéthique du 29 juillet 1994 : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».
[1] Le Monde, Jean-Baptiste Jacquin, Comment la Fondation Jérôme Lejeune entrave la recherche française (16/09/2024)