Doit-on lever l’anonymat du don de gamètes ?

Publié le 26 Jan, 2009

Le Monde a consacré une interview à Irène Théry, sociologue, directrice d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales et auteur de "La distinction de sexe" (Odile Jacob, 2007), à propos de l’anonymat des dons de sperme ou d’ovocytes dans les cas d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Pour elle, il faudrait revenir sur ce principe d’anonymat, afin que les enfants nés d’un don de sperme ou d’ovocytes puissent avoir un jour accès au nom du donneur. "Est-il normal de bafouer le droit fondamental de toute personne d’avoir accès aux informations la concernant ?", s’interroge-t-elle.

Elle explique qu’en 1994, quand on a légalisé le principe de l’anonymat du don, on a raisonné par assimilation du don de sang. Or, "le don d’engendrement est tout à fait spécifique ! Il engage […] le donneur, le receveur et l’enfant né du don". On a "oublié" l’enfant… Elle explique également qu’à l’époque "on a érigé en modèle universel le seul don qui existait à l’époque, le don de sperme, sans penser que ce modèle masculin s’appliquerait très mal, voire pas du tout, à des dons féminins". Elle estime qu’à l’époque 95% des couples ayant recours au don de sperme "pensaient ne jamais rien dire à leurs enfants", alors qu’aujourd’hui personne ne pense comme cela.

Elle rappelle qu’en Suède, Autriche, Norvège, Islande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Belgique et Suisse, le don n’est pas anonyme. Ces pays distinguent et lient deux statuts complémentaires : celui de donneur d’engendrement et celui de parent par filiation.

Interrogée sur les mères porteuses, elle souligne que dans ce cas la gestatrice fait un don d’engendrement, comme la personne qui donne son sperme ou un ovocyte. "Comment inscrire quelque chose d’aussi important qu’une grossesse de neuf mois dans une logique où l’anonymat du don signifie en réalité : "il ne s’est rien passé?"

Elle conclut enfin que lever l’anonymat "c’est bien plus qu’ôter un cache sur un nom : c’est apprendre à changer de regard sur la filiation contemporaine pour affronter les nouvelles responsabilités qu’elle nous confère sans oublier que ce que nous devons au minimum aux enfants découle de ces mots de la philosophe Hannah Arendt : répondre à la question qui, c’est raconter une histoire".

Le Monde 26/01/09

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