« Que veut dire prendre de l’âge ? interroge Laure Adler. Est-ce un destin biologique ? Est-ce une expérience transmissible ? Est-ce une calamité ? » Dans une interview pour le journal le Monde, l’essayiste, « ancienne directrice de France Culture, aujourd’hui productrice et animatrice de L’Heure bleue sur France Inter », affirme que « dans une multitude de domaines, scientifique, philosophique, artistique, seul un certain âge permet l’abandon – et la licence – nécessaires à la poursuite de ses profondes intuitions ». « L’âge deviendrait en somme un privilège, un ferment de création, la plage de tous les possibles », estime-t-elle. « J’atteins un rivage où le temps m’apparaît au contraire presque illimité », confie l’essayiste. « Et où les mots “chance“, “cadeau“, “bénef“ s’imposent. »
« En première ligne », elle témoigne de « la douleur d’avoir une mère en Ehpad [qui l’]étreint constamment ». « Et je n’ai pas encore eu le temps de penser le départ de mon père, décédé dans la chambre d’à côté pendant le confinement » révèle-t-elle. Alors, à 70 ans, Laure Adler dénonce « une société réactionnaire, violente et méprisante envers ses vieux ». « Une société archaïque qui les exclut et les ghettoïse, signe infaillible de l’échec d’une civilisation. Une société cruelle qui stigmatise la vieillesse, l’associe à la dégénérescence et la condamne au rebut. » « Je vous assure, et il faut faire passer le message aux jeunes : dans chaque vieux subsiste une irrépressible jeunesse. »
Source : Le Monde, Annick Cojean (06/09/2020) – Photo : iStock