Implants cérébraux : l’intérêt, et les craintes, de l’Académie de médecine

Publié le 19 Déc, 2023

La semaine dernière, l’Académie nationale de médecine a publié un communiqué de presse relatif aux implants cérébraux.

Une activité en forte croissance

« L’objectif principal des recherches actuelles est d’augmenter considérablement le nombre de neurones reliés par autant de fibres à un micro-processeur afin d’enregistrer et de stimuler l’activité cérébrale pour traiter des maladies neurologiques, comme la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson ou l’épilepsie, ou étudier l’activité neuronale à des fins de recherche », analyse l’Académie. La recherche s’est intensifiée dans le domaine : « de moins d’une dizaine de publications par an autour des années 1980 », on a recensé « jusqu’à plus de mille publications en 2021 ».

Cependant la recherche n’est pas qu’académique, relève l’Académie en pointant les travaux de diverses entreprises : Synchron, Neuralink, Precision Medicine ou Paradromics, « pour ne citer que les plus connues ». Synchron a commencé à implanter des dispositifs chez l’homme, aux Etats-Unis en 2021, puis en Australie en 2022 (cf. Essai d’un implant cérébral pour traiter la dépression). Neuralink, elle, a reçu un feu vert en mai dernier et « ouvert un registre permettant à de potentiels patients de s’inscrire » (cf. Neuralink : feu vert de la FDA pour des essais sur l’homme ; Neuralink : plainte et enquête pour maltraitance animale).

Une visée médicale ou transhumaniste ?

« Si la grande majorité des sociétés investissant dans ce domaine vise, semble-t-il, à développer des implants cérébraux à usages strictement médicaux, certains acteurs, comme Neuralink, ne cachent pas leurs ambitions de doter les humains d’implants pouvant augmenter leurs capacités intellectuelles (mémoire, calcul, motivation, créativité, transmission de pensée…), créant ainsi une classe d’êtres humains « augmentés » », alerte l’Académie de médecine.

Or, « cette quête d’un transhumanisme est porteuse de risques très importants, comme de créer deux nouvelles catégories d’êtres humains, l’une, dont le comportement, préfiguré par celui de nombreux utilisateurs actuels de réseaux sociaux, pourrait rester sous le contrôle de l’entreprise responsable de l’implant, instaurant une nouvelle forme d’esclavage, l’autre, disposant de capacités intellectuelles supérieures lui permettant de dominer la population non équipée ».

Le besoin d’un moratoire

Face à ces craintes, l’Académie de médecine appelle néanmoins les pouvoirs publics à soutenir « ce domaine de recherche porteur d’espoirs pour de nombreux malades souffrant notamment d’affections neurologiques » (cf. Des implants cérébraux pour « rallumer les lumières » longtemps après une lésion traumatique). Toutefois, elle souligne l’importance des publications scientifiques pour rester « vigilants et lucides par rapport aux annonces faites à la presse par les entreprises de biotechnologie » (cf. Neuralink : un essai clinique annoncé en 2022). Elle indique par ailleurs que les organismes d’assurance maladie devront prendre en charge les dispositifs « efficaces et sûrs pour les malades, mais de coût élevé ».

Enfin, l’Académie invite à tenir « une réunion internationale au cours de laquelle médecins, scientifiques et politiques débattraient d’un moratoire sur l’utilisation des implants cérébraux destinés à augmenter les capacités intellectuelles des êtres humains en dehors du contexte de maladies, à l’instar de celle tenue à Asilomar en 1975 sur les recombinaisons génétiques ». A sa suite, des « règles strictes relatives à l’utilisation des données générées à partir de ces implants » pourraient être adoptées (cf.  Le Chili veut garantir les droits du cerveau).

Des « règles strictes » qui, par expérience, risquent d’être « assouplies » un jour ou l’autre (cf. Embryons génétiquement modifiés : le Conseil d’Etat désavoue l’ABM).

 

Photo : iStock

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