AMP et recherche sur l’embryon

Publié le 3 Fév, 2009

A la veille de la révision de la loi de bioéthique, Le Quotidien du Médecin revient sur ce qui en sera l’un des enjeux majeurs : la libéralisation de la recherche sur l’embryon. Reprenant la proposition de l’Agence de la biomédecine de ne pas exclure l’embryon de la recherche pour lui-même et de la recherche clinique, le quotidien insiste sur le fait que la recherche sur l’embryon ne se limite pas aux seuls travaux sur les cellules souches embryonnaires (CSE), mais ouvre aussi la voie à l’amélioration des techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Rappelons dans un premier temps que la loi de 2004 a interdit, par principe, toute recherche sur l’embryon humain. Toutefois, celle-ci est autorisée, par dérogation et pour cinq ans, sur les embryons dits "surnuméraires" – c’est-à-dire ceux créés in vitro dans le cadre d’une AMP qui ne font plus l’objet d’un projet parental ou ceux porteurs d’une anomalie détectée après un diagnostic préimplantatoire (DPI). Le législateur a assorti cette entorse à la règle de l’interdit de deux conditions majeures : que ces recherches soient "susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs" et qu’elles ne puissent pas "être poursuivies par une méthode alternative d’efficacité comparable". Par ailleurs, les embryons qui font l’objet de recherches ne peuvent pas être réimplantés.

Le quotidien souligne que, contrairement à la recherche sur les CSE, "la recherche concernant l’embryon lui-même n’a pas fait l’objet du même engouement médiatique". Selon l’Agence de la biomédecine, chargée de délivrer les autorisations de recherches sur l’embryon, seuls trois projets sur 43 actuellement en cours portent sur l’embryon lui-même. Pour l’Agence, cela s’explique par "l’impossibilité de faire le lien entre la capacité de l’embryon de se développer in vitro et celui de s’implanter in vivo". Et pourtant, d’après Le Quotidien du Médecin, intégrer l’embryon dans le champ médical et scientifique, au même titre que tout autre individu, permettrait notamment de répondre à la demande des couples, de plus en plus nombreux, qui recourent à l’AMP, et ce, en améliorant l’efficacité des techniques d’AMP.

Président de la Fédération des biologistes des laboratoires d’études de la fécondation et de la conservation de l’œuf (BLEFCO), le Dr Patrice Clément explique l’inefficacité de ces techniques : "si vous reprenez le déroulement des FIV, sur 100 ovocytes prélevés, à peu près 60% sont fécondés. On perd déjà 40% d’ovocytes, pourtant matures sur un plan nucléaire. Sur les 60 embryons obtenus, on en a environ 20 à 30 qui sont de bonne qualité. Ce résultat, on peut sûrement l’imputer en partie aux gamètes que l’on utilise pour former ces embryons, aux milieux de culture, aux techniques de FIV, aux problématiques de température… Et sur ces 30 embryons formés, entre 10 et 15 vont s’implanter". "Si nous voulons améliorer nos résultats en FIV, il est nécessaire d’étudier toutes ces étapes", conclut-il, d’où la justification de la recherche sur l’embryon.

Membre du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine et chef du service de biologie de la reproduction au CHU de Tours, le Pr Dominique Royère justifie à son tour cette recherche : "si on peut arriver à définir des conditions qui puissent rendre possible de prédire – faisons une hypothèse – à 80% les chances d’implantation d’un embryon, les conséquences sont très importantes car elles conduiront à obtenir de meilleurs résultats que les 20% de grossesses obtenues aujourd’hui. Cela engendrera forcément des économies en ce qui concerne le nombre de tentatives et le coût global que représente l’arrivée d’un enfant. Par ailleurs, il nous sera plus facile de convaincre les couples de ne transférer qu’un embryon, avec pour conséquence la réduction des grossesses multiples à risque et des séjours en néonatalogie pour les prématurés".

Ainsi, pour l’Agence de la biomédecine, la révision de la loi de bioéthique pourrait être l’occasion de "s’interroger sur l’interdiction de réimplanter tous les embryons soumis à une quelconque recherche". On apprend d’ailleurs qu’un dispositif transitoire, en attendant la nouvelle loi, serait en cours d’élaboration avec l’Agence française des produits de santé (AFSSAPS)…

Le Quotidien du Médecin (Stéphanie Hasendahl) 03/02/09

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