« Guérir. Au cours de leurs études comme tout au long de leur carrière, les médecins sont formés à cet objectif, se focalisant sur cette médecine curative triomphante au détriment des médecines préventive et palliative, laissant ainsi de côté une part cruciale de nos existences : la fin de vie ».
Dans une tribune pour le journal La Croix, le Dr Claude Grange, expert en soins palliatifs de la Fondation Clariane [1] aussi auteur de l’ouvrage Le Dernier Souffle, et Stanislas de Zutter, cofondateur de Santé Académie [2], appellent à « changer de paradigme dans la manière dont nous soignons les mourants ». « Arrêtons de considérer la fin de la vie comme un échec thérapeutique », enjoignent les deux signataires. Au contraire, « plaçons la médecine au service des souhaits du patient et construisons des projets de soins personnalisés en fonction des dernières volontés de chacun ».
« Ce changement de paradigme doit avoir lieu en dehors du monde médical, jusqu’au plus haut niveau de l’Etat », estiment-ils. « Il suffit de consulter les nombreuses études économiques et scientifiques sur le sujet de la cancérologie, souvent basées sur le nombre d’années de vie des populations, pour comprendre qu’on privilégie la quantité de vie à sa qualité pour les patients en phase terminale ».
Mobiliser et former tous les professionnels
« Médecins, infirmiers, aides-soignants, psychologues, auxiliaires de vie… tous les professionnels médicaux et paramédicaux doivent bénéficier de connaissances équivalentes pour acquérir des compétences et accompagner les patients mourants, qu’ils soient à l’hôpital ou en ville, et une coordination interdisciplinaire est essentielle », jugent le Dr Grange et Stanislas de Zutter.
« Les professionnels de santé sont trop peu à s’intéresser aux sujets de l’accompagnement à la fin de vie, quand bien même ils en auraient la possibilité », déplorent-ils. Selon eux, ce sont « un manque de sensibilisation, et la peur de la mort » qui sont en cause, « celle-ci interrogeant chacun sur son humanité, sa vulnérabilité ». Ils invitent à développer la formation, notamment continue, de tous ces professionnels.
« Il en va de l’honneur de notre pays de développer la médecine palliative pour permettre à chacun de quitter sa vie de façon paisible, entouré de ses proches comme de professionnels de santé compétents et bienveillants », interpellent-ils. « N’oublions pas qu’une société se juge aussi à la façon dont elle s’occupe de ses morts ! »
[1] « La Fondation Clariane dédie ses actions aux soignants et aux métiers du soin en menant des projets autour de la santé physique et morale des soignants, l’attractivité des métiers du soin et le sens du métier »
[2] Un organisme qui propose des formations en ligne pour des professionnels de santé
Source : La Croix, Dr Claude Grange et Stanislas de Zutter (11/01/2024) – Photo : iStock