Mardi, les journaux belges ont médiatisé une décision de justice rendue quelques mois plus tôt, à propos d’un « bébé médicament » : le tribunal de première instance de Bruxelles a estimé que « la naissance d’un enfant peut entrainer un préjudice qui mérite une réparation financière ». Une décision qui va à l’encontre de la jurisprudence belge et internationale.
Cette affaire concerne une famille espagnole. En 2010, le couple se rend à Bruxelles, dans une clinique « réputée » pour leur fils[1], atteint de béta thalassémie. Pour le guérir, la seule option disponible est « une greffe de moelle osseuse issue d’une personne non porteuse du gène concerné et compatible avec le receveur ». Les parents envisagent alors une fécondation in vitro avec diagnostic préimplantatoire (DPI) pour sélectionner un embryon compatible, un « bébé médicament » (cf. « Bébé-médicament » : le volte-face contre l’embryon).
Au cours du processus de PMA, trois embryons sont conçus in vitro. Les médecins en sélectionnent un. Mais deux sont finalement transférés, et à la naissance, aucun des enfants n’est compatible avec le fils aîné. En 2018, le couple recourt de nouveau au DPI, à Madrid. Un « bébé donneur » naît de cette nouvelle PMA. La greffe de moelle osseuse « donnée » par cet enfant a lieu en 2020.
Le couple a ensuite déposé un recours devant la justice belge, au motif « qu’ils désiraient deux enfants et en avaient désormais quatre ». Ils réclamaient « une sanction contre [la clinique belge impliquée] et une réparation des dommages moraux et matériels ».
Le tribunal de première instance de Bruxelles a donné raison à ce couple, accordant un « dédommagement » à la mère de 27000€ et au père de 11000€, ainsi qu’une « compensation matérielle » de 25000€ pour le couple, pour le « ‘choc’ subi lorsqu’ils ont appris que les jumeaux ne pourraient servir de donneur et ‘de la peur et des risques’ générés par une nouvelle grossesse ». Le fils aîné a également reçu 5000€ « au titre du retard subi pour sa transplantation ». La clinique a pour sa part « promis d’’améliorer ses procédures’ pour éviter la réédition d’une telle affaire ».
[1] La clinique de fertilité de l’université flamande de Bruxelles (VUB)
Source : Le Monde, Jean-Pierre Stroobants (24/11/2021)
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