Convention citoyenne : un week-end clef pour la fin de vie en France ?

21 Fév, 2023

Ce week-end, la dernière session de la phase de délibération de la convention citoyenne sur la fin de vie s’est achevée.

Une session riche au cours de laquelle ont eu lieu deux votes officiels. Ils avaient notamment pour objectif de déterminer les orientations de la convention sur l’ouverture d’une éventuelle « aide active à mourir » et de répondre à la question de la Première ministre : « le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? »

Développer « quoi qu’il en soit » l’accompagnement en fin de vie

Avant de débattre sur les questions du suicide assisté et de l’euthanasie, il a été demandé aux citoyens choisis de se positionner sur le cadre actuel d’accompagnement des patients en fin de vie. Cette séquence, a une fois encore révélé, le travail énorme qu’il reste à faire en France pour développer les soins palliatifs et la culture palliative (cf.  Soins palliatifs : les six propositions de la SFAP ).

Un vote « en rafales » a eu lieu samedi pour déterminer vingt-cinq idées fortes à faire figurer dans le rapport, et à développer « quoi qu’il en soit ».

Parmi les points retenus, une large majorité des participants s’est positionnée en faveur d’une égalité d’accès aux soins palliatifs, d’une meilleure adaptation de ces soins aux patients, du renfort de l’accompagnement à domicile, de la formation des médecins, ou d’une meilleure information sur les alternatives et les droits en fin de vie.

Outre les soins palliatifs, ces idées fortes intègrent aussi le respect du choix et de la volonté du patient, l’organisation du parcours de soin de la fin de vie, ou les moyens financiers et de recherche dédiés à la fin de vie.

Des citoyens favorables à l’ « aide active à mourir »

Sans surprise, et comme les deux précédents votes le laissaient présager (cf. Convention citoyenne : début (et fin ?) de la délibération), 84% des citoyens de la convention considèrent que le cadre actuel n’est pas adapté aux différentes situations de fin de vie rencontrées, et qu’il faudrait apporter des changements.

Au regard des votes qui ont eu lieu dimanche, les participants se sont exprimés à 75 % en faveur d’une évolution de la loi vers « l’aide active à mourir ». Concernant les modalités, 72% étaient pour le suicide assisté et 66% pour l’euthanasie.

Un vote pour ou contre « en cascade » qui a dû être réalisé en trente secondes, balayant ainsi les débats sur la conception de la fin de vie qui avaient eu lieu durant cette session dans les différents groupes de réflexion.

Ce qui prévaut pour la majorité est la « libre auto-détermination » de la personne, qui doit pouvoir choisir d’éviter « la torture » en fin de vie comme n’hésitent pas à le dire certains. La personne de confiance et les directives anticipées semblent faire consensus pour témoigner, si besoin, de la demande du patient. Le positionnement des proches dans la prise de décision a en revanche posé question.

Des questions restent en suspens sur les conditions

Les opinions divergent sur les conditions d’accès à l’« aide active à mourir ». Les critères de maladies ou de capacité à exprimer sa volonté ne font pas consensus. Souffrance, âge, maladie incurable, pronostic vital engagé, discernement, conscience des personnes en fin de vie, autant de questions qui restent en suspens.

Souvent les mêmes intervenants dans l’hémicycle pour alerter sur les dérives d’une ouverture de l’ « aide active à mourir » ou sur les problèmes des pays étrangers (cf. Les dérives inquiétantes de la pratique de l’euthanasie en Belgique), pourtant érigés en exemple par certains. Il est clair que la question des dérives dérange et divise les citoyens, y compris au sein de la convention citoyenne.

En revanche, il est surprenant de constater que l’ouverture de « l’aide active à mourir » aux mineurs (cf. Extension de l’euthanasie aux mineurs en Belgique, la France suivra-t-elle?), si elle a soulevé quelques questionnements lors des échanges, est acceptée par la majorité des citoyens de la convention. 56% d’entre eux sont pour que le suicide assisté leur soit ouvert, et 67% pour l’euthanasie.

« Des conclusions qui n’engagent pas notre démocratie »

Un tournant a été pris avec ces votes. « Nous venons de passer une étape charnière de la convention citoyenne. L’issue de la phase de délibération a permis aux citoyens de formuler une réponse à la première partie de la question de la Première ministre. Ces orientations clés désormais actées, les citoyens vont pouvoir développer leurs propositions et harmoniser leur réponse avant de procéder à des votes décisionnels » indique Claire Thoury, présidente du comité de gouvernance de la Convention, à l’issue de la session.

De son côté, l’eurodéputé LR François Xavier Bellamy nuance les choses et déclare ce lundi sur Sud Radio que la convention citoyenne « tourne en rond et produit des conclusions qui n’engagent pas notre démocratie ». « Le jour où vous avez la possibilité de mourir plutôt que de continuer le parcours de soins, [..] les questions se posent à vous d’une manière complètement différente : vis-à-vis de votre famille [..], vis-à-vis de votre entourage, vis-à-vis des médecins eux-mêmes » ajoute-t-il.

Il reste désormais trois sessions de restitution avant le dépôt du rapport de la convention. Reste également à savoir ce que le gouvernement entendra ensuite faire de ces propositions.

L’alerte des soignants, qui ont publié un avis éthique commun dans lequel ils unissent leurs voix pour dénoncer « un changement majeur d’approche » et « refusent catégoriquement la démarche euthanasique » (cf. 800.000 soignants s’opposent à l’euthanasie), sera-t-elle entendue ?

Photo : Pixabay

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