La Fondation de l’Avenir[1] a dévoilé ce matin les résultats d’une enquête menée dans 11 centres hospitaliers auprès de 453 femmes pour évaluer le niveau de douleurs dans les IVG médicamenteuses. Un sujet qui fait l’objet de peu d’études.
Aujourd’hui en France, avec 220 000 avortements par an, 1 femme sur 5 avorte. Un chiffre stable, bien que la contraception soit très largement accessible : 80% des femmes utilisent un moyen de contraception (cf. La contraception réduit le nombre d’avortements ? Réponse d’experts).
Depuis 1990, date de l’autorisation de l’IVG médicamenteuse, sa part n’a cessé d’augmenter : elle représente aujourd’hui 57% des avortements pratiqués en France. Les résultats de l’étude montrent que 27% de femmes ayant réalisé une IVG médicamenteuse[2] ont ressenti des douleurs très intenses au 3e jour de l’IVG. Elles témoignent : « Je n’ai jamais eu aussi mal de ma vie. Une douleur sans nom », « la douleur a été foudroyante », « la méthode médicamenteuse est très douloureuse. Même si on nous parle de la douleur, on ne l’imagine pas à ce point ». 83% des femmes affirment avoir pris des antidouleurs lors des cinq jours du traitement. Plus d’une femme sur 4 a déclaré avoir été inquiète des saignements provoqués par la prise des médicaments.
Les femmes notent les effets ressentis au cours des 5 jours de traitements : de la fatigue (88%), des nausées (70%), des vertiges (42%), des maux de tête (42%), des diarrhées (37%), et enfin des vomissements (28%). Au total, 94% des femmes ont déclaré au moins un des symptômes, autres que la douleur, dans les cinq jours qui suivent l’IVG.
Elles décrivent aussi un sentiment de frayeur, l’anxiété qui les a saisies. Elles sont effrayées par ce qui se passe. Certaines ont commenté : « Qu’est-ce que je suis en train de faire ? ». Marie-Josèphe Saurel-Cubizoles, chercheur épidémiologiste à l’INSERM, explique avoir été impressionnée par « la gravité des commentaires spontanément laissés par les femmes ». Elle rappelle que « l’IVG n’est jamais un acte anodin, ni banal ». Elle « insiste sur une certaine solitude ressentie lors de cette épreuve voire une culpabilité pour certaines » : « C’est une souffrance psychologique et physique très importante, assortie d’un sentiment de honte », note une femme. Ces femmes déplorent « le manque d’information sur les effets secondaires liés au traitement comme l’intensité des saignements ». 27% d’entre elles les ont trouvés « inquiétants ». L’une d’elle écrit en commentaire : « Les saignements ont duré plus de 20 jours. C’est éprouvant, on a du mal à passer à autre chose ».
Finalement, seuls 40% des femmes ont répondu au questionnaire. Pour Marie-Josèphe Saurel-Cubizoles, « certaines femmes ne veulent pas revenir sur un évènement douloureux ». Paradoxalement, 81% de celles qui étaient interrogées ont répondu qu’elles choisiraient la méthode médicamenteuse si la question d’une IVG se posait à nouveau. Mais certaines le reconnaissent : « Je ne tiens pas à refaire une IVG, c’est traumatisant ».
[1] La Fondation de l’Avenir encourage et soutient la recherche médicale appliquée, passerelle entre la recherche fondamentale et l’application aux patients.
[2] Les IVG médicamenteuses sont pratiquées jusqu’à la fin de la 5e semaine de grossesse. En établissement de santé, ce délai peut être prolongé jusqu’à 7 semaines de grossesse. Un protocole médicamenteux spécifique est utilisé pour ce délai de 2 semaines, plus tardif. La méthode de l’IVG médicamenteuse consiste à prendre deux médicaments différents (comprimés) en présence du médecin au cours de deux consultations, puis, à vérifier que la grossesse est bien interrompue au cours d’une visite de contrôle. Trois parcours sont possibles : l’hôpital, le centre de planification ou le médecin de ville.