Dans une lettre adressée aux députés, Marc-Henri d’Alès, « personne lourdement handicapée de naissance, en fauteuil depuis 42 ans » s’indigne : « Quand certains identifient la dépendance à la fin de la vie, c’est dégradant. Moi, personne handicapée depuis ma naissance, je dis halte là : je ne suis pas dégradé ». « Ma vie a-t-elle moins de valeur que celle de mon voisin ?, interroge-t-il. Pourtant ma vie n’est pas indigne, je vous le garantis. »
Pour Marc-Henri d’Alès, « le “laissez-nous avoir le choix” est biaisé car si vous me demandez si je veux vivre dans cet état handicapé, dans cet état de souffrance, je vous réponds tout de suite : plutôt mourir ! ». « Aujourd’hui, pour autant, je suis témoin que la souffrance se traverse si elle est accompagnée, affirme-t-il. Aujourd’hui, personne handicapée, je ne demande pas à mourir ; je demande à être soulagé de ma souffrance. »
Le témoignage de Philippe Pozzo di Borgo, parrain et soutien du Collectif Soulager mais pas tuer, est semblable. « En toute liberté, après mon accident, quand je ne voyais pas de sens à cette vie de souffrance et d’immobilité, j’aurais exigé l’euthanasie si on me l’avait proposée, assure-t-il. En toute liberté, j’aurais cédé à la désespérance, si je n’avais pas lu, dans le regard des soignants et de mes proches, un profond respect de ma vie, dans l’état lamentable dans lequel j’étais. » Mais c’est « leur considération [qui] fut la lumière qui m’a convaincu que ma propre dignité était intacte, témoigne-t-il. Ce sont eux – et tous ceux qui m’aiment – qui m’ont donné le goût de vivre. »
L’interdit de tuer « nous met sur un pied d’égalité »
« Vous ne vous rendez pas compte du désastre que provoque chez les personnes qui se débattent avec des vies difficiles votre soutien à l’euthanasie ou au suicide assisté comme des morts “libres, dignes et courageuses“ », avertit Philippe Pozzo di Borgo. « On nous dit : “C’est un droit qu’on vous propose ; il ne vous enlève rien.” Mais si ! assure-t-il. Ce prétendu droit m’enlève ma dignité, et tôt ou tard, me désigne la porte. » Et d’alerter : « Ne voyez-vous pas la pression – pour ne pas dire l’oppression – qui monte quand une société rend éligibles à la mort les plus humiliés, les plus souffrants, les plus isolés, les plus défigurés, les moins résistants à la pitié des autres, et – certains le revendiquent déjà – les plus coûteux ? » Car c’est bien l’interdit de tuer qui « nous met sur un pied d’égalité, m’autorise à exister », estime Philippe Pozzo di Borgo, et « si j’en éprouve le besoin, à me plaindre sans craindre d’être poussé vers la sortie ».
Pour Nicolas Tardy-Joubert, président de la Marche pour la Vie, le « droit à mourir dans la dignité », « n’est finalement qu’une négation de la personne humaine ». Car la personne « ne devient pas indigne parce que son état physique ou mental se dégrade ». « Le devoir est de soulager, d’accompagner la personne humaine et de respecter la vie. »
Sources : Atlantico, Philippe Pozzo di Borgo (08/04/2021) ; Ombres et lumière, Marc-Henri d’Alès (02/04/2021) ; France soir (08/04/2021) – Photo : Steve Buissinne de Pixabay