Fabriquer des organes humains dans des porcs ou des moutons, fiction ou réalité ?

Publié le 6 Jan, 2016

Les chimères animales-humaines pourraient devenir une alternative au don d’organes. Mais cette nouvelle approche suscite des inquiétudes et nécessite de la prudence.

 

Une chimère animale-humaine est obtenue en injectant des cellules humaines dans des embryons d’animaux âgés de quelques jours. Ces embryons sont ensuite implantés dans une femelle d’animaux d’élevage. Ces expériences peuvent être menées grâce aux avancées dans la biologie des cellules souches et les techniques de modification génétique : « En modifiant les gènes, les scientifiques peuvent modifier facilement l’ADN dans des embryons de porcs ou de moutons pour qu’ils soient incapable de former un tissu spécifique. Ensuite, en ajoutant les cellules souches d’une personne[1], les scientifiques espèrent que les cellules humaines prendront le relai pour former l’organe manquant ». On obtient ainsi une chimère qui a « le corps d’un animal mais un ou plusieurs organes humains ». Pour l’heure, ces expériences n’ont été menées à leur terme qu’entre animaux.

 

Aux Etats Unis, le National Institute of Health a pour sa part annoncé en septembre 2015 qu’« il ne financerait pas d’études impliquant des chimères animales humaines à moins que ces études soient passées au crible pour leurs implications sociales et scientifiques ».

 

Toutefois des centres américains de recherche ont soulevé d’autres financements pour développer des tissus humains à l’intérieur de porcs et de moutons « afin de créer des cœurs, des foies et d’autres organes pour la transplantation ». Le MIT technology review estime ainsi que « plus de 60 portées de chimères porc-humain ou mouton-humain ont été crée au cours des douze derniers mois aux Etats Unis ». Ces expériences « n’ont pas encore été décrites dans des travaux scientifiques et aucune des chimères n’est arrivée à terme ». « Nous ne voulons pas encore développer des chimères dans des stades avancés pour éviter la polémique », a déclaré Pablo Ross[2], « mais il y a déjà des questions qu’on doit traiter. Pour le moment, la contribution des cellules humaines dans des animaux est de 3 à 5%. Mais qu’est ce qui se passe si on implante 100% du cerveau humain ? Qu’est ce qui se passe si l’embryon, qui se développe, est majoritairement humain ? »

 

[1] Les chercheurs utilisent des cellules iPS, c’est-à-dire des cellules du patient reprogrammées, permettant ainsi d’éviter tout rejet de greffe.

[2] Vétérinaire et biologiste en développement de l’université de Californie.

 

MIT Technology Review (6/01/2016)

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