Fin décembre, 50 organisations canadiennes de personnes en situation de handicap et de défense des droits de l’homme ont dénoncé les dernières extensions de l’« aide médicale à mourir ».
En effet, le 23 décembre, elles ont envoyé une lettre [1] au ministre fédéral de la justice ainsi qu’au Premier ministre et à tous les chefs de partis politiques afin d’exprimer « leurs inquiétudes et leur opposition à la légalisation de l’aide médicale à mourir (AMM) pour maladie mentale ainsi qu’à la pratique déjà légalisée de l’euthanasie des personnes en situation de handicap qui ne sont pas en phase terminale ».
Un système en échec
Depuis sa création en 2016, l’« aide médicale à mourir » n’a cessé de faire sauter, les unes après les autres, les « protections » existantes pour s’élargir de plus en plus. Alors que la loi C-7, votée en mars 2021, a supprimé le critère de « mort raisonnablement prévisible » (cf. Au Canada, nouvel assouplissement des conditions d’accès à l’aide médicale à mourir), les associations demandent au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour renoncer totalement à ces dispositions permettant aux personnes qui ne sont pas en phase terminale d’obtenir l’AMM (cf. L’euthanasie devient « une option de fin de vie » au Canada).
« La loi actuelle ne fonctionne pas » constatent les associations. Face au handicap ou à la détresse, l’« aide médicale à mourir » se généralise et les exemples de dérives se multiplient (cf. Canada : un homme bientôt sans domicile demande l’euthanasie, feu vert du médecin). « Nous ne pouvons pas offrir une “aide à mourir étatisée” aux personnes qui ne sont pas en phase terminale sans garantir un droit légiféré à une vie décente pour tous » font-elles remarquer.
« Une procédure discriminatoire »
En mars prochain, la loi devrait élargir l’accès de l’AMM aux personnes souffrant de maladies mentales (cf. Canada : l’AMM reportée pour les personnes atteintes de maladies mentales ). « La légalisation de l’AMM pour maladie mentale est une procédure discriminatoire » s’indignent les associations, « cette loi est une menace pour les personnes en situation de handicap et leurs familles » (cf. Face au handicap ou à la pauvreté, l’aide médicale à mourir se généralise au Canada ; Canada, les personnes handicapées ne veulent pas mourir).
« Plus de deux millions de Canadiens de plus de 15 ans ont une déficience liée à une maladie mentale » rappellent les associations. « Nous ne pouvons pas permettre à une discrimination systémique de cette ampleur de se poursuivre » poursuivent-elles. « Légaliser l’AMM pour maladie mentale consisterait à mettre de l’huile sur un feu déjà hors de contrôle » alertent-elles (cf. Canada : l’élargissement sans limite de l’« aide médicale à mourir » ).
Face à cette pente glissante, il serait temps de prévoir plutôt une « aide à vivre » afin de « garantir une protection pour tous, y compris pour les personnes en situation de handicap ».
Alors que les demandes d’euthanasies sont en constante augmentation dans le pays (cf. Canada : les chiffres témoignent d’une explosion de l’aide médicale à mourir en 2021) et que le cadre initial de la loi, pourtant récente, a volé en éclats, leur alerte sera-t-elle entendue ? Parviendront-ils à arrêter cet engrenage qui semble inéluctable ?
[1] La lettre a été publiée le 23 décembre 2022 par la British Columbia Aboriginal Network on Disability Society (BCANDS) sur son compte Twitter (@BCANDS1)