« J’ai vu et accompagné, comme médecin urgentiste, des morts brutales, ou non, de personnes âgées, d’adultes mais aussi d’enfants, de nourrissons… Je me souviens de chaque enfant pour lequel j’ai arrêté une réanimation », témoigne le ministre de la Santé, François Braun, dans un entretien pour le journal Le Monde. « En tant qu’urgentiste, j’ai eu très souvent à réanimer des personnes après une tentative de suicide, indique-t-il. Cela représente même tout un pan de l’activité d’urgentiste. Dans un nouveau cadre légal, s’il devait y en avoir un, il faudrait pouvoir continuer de le faire. »
Un débat « encore ouvert » ?
Pour le ministre, « parler de fin de vie est réducteur ». Car chaque situation est différente, assure-t-il, insistant sur l’importance du « parcours jusqu’aux derniers instants ». « Accompagner la mort, ce n’est pas donner la mort » ajoute-t-il.
« Le débat sur l’aide active à mourir est encore ouvert », assure François Braun (cf. Fin de vie : un processus construit pour aboutir à légaliser l’euthanasie ?). « Un texte de loi allant en ce sens changerait profondément notre société et notre rapport à la mort », souligne-t-il, qualifiant l’euthanasie de « solution extrême ». Une « solution » « à laquelle je dois encore prendre le temps de réfléchir », indique le ministre de la Santé.
Du « débat de société » au « temps politique »
La Convention citoyenne terminée, « on entre dans la phase d’après ». « Il s’agit maintenant de rebasculer ce débat de société sur un temps politique. Et d’avancer », juge François Braun qui promet de ne pas faire de « politique politicienne sur un sujet comme celui-là ».
« Si la société devait avancer dans le sens d’une aide active à mourir, ce ne pourrait être que dans des cas très précis et qui devraient être rigoureusement encadrés », estime-t-il (cf. Euthanasie et risques de dérives : des médecins rappellent les faits).
Le ministre explique ne pas vouloir que l’« aide active à mourir » puisse « s’imposer comme une obligation aux médecins ». Toutefois, « si le suicide assisté n’est pas considéré comme un acte médical, je ne crois pas qu’une clause de conscience s’impose », précise-t-il, sans l’exclure complètement. « Elle peut être envisagée, aussi, pour la prescription, la rédaction d’ordonnance », indique-t-il.
« La loi actuelle ne permet pas de répondre à tout. Mais, même en bougeant les lignes, on ne répondra jamais à toutes les situations », rappelle François Braun.
Source : Le Monde, Mattea Battaglia et Béatrice Jérôme (08/04/2023)