Dans un entretien pour Le Figaro, Emmanuel Hirsch, professeur émérite d’éthique médicale à l’université Paris-Saclay, décrypte la proposition de loi « bien vieillir » déposée par la majorité présidentielle et discutée à l’Assemblée nationale la semaine dernière (cf. Grand âge : le manque d’ambition de l’exécutif ?). « Notre responsabilité collective est engagée » afin d’accompagner et de prévenir avec l’attention et les moyens qui conviennent le vieillissement de la population affirme-t-il.
Accorder une dignité aux plus âgés
« Cette proposition de loi témoigne d’une approche novatrice (..) de ce que devrait être l’hospitalité de notre démocratie à l’égard des personnes reconnues dans leur droit à une vieillesse respectée, accueillie et accompagnée parmi nous » considère le professeur.
« Dans un contexte où s’entrechoquent tant d’urgences sociales, accorder une dignité aux plus âgés parmi nous est un acte politique fort. Cette proposition de loi doit être comprise comme un moment significatif de mutations tant du point de vue des mentalités que des pratiques sociales » estime-t-il.
Notre collectivité « ne peut exclure de ses engagements ceux qui après, avoir servi le bien commun, peuvent aspirer à une sollicitude particulière, à l’adaptation de la cité à leurs attentes et leurs besoins, et à une protection si nécessaire » rappelle Emmanuel Hirsch.
Il importe de reconnaitre l’implication sociale des plus âgés, « leur contribution essentielle au sein des familles ou dans la vie associative qui bénéficie de l’expérience voire de la sagesse de l’âge » ajoute-t-il.
Le vieillissement, un enjeu et non un fardeau
L’intitulé de la proposition de loi nous propose de « bâtir la société du bien-vieillir en France » relève également Emmanuel Hirsch. « Elle nécessite une mobilisation de chacun d’entre nous », une capacité d’envisager le vieillissement « non pas comme un fardeau, mais comme un enjeu en termes de réalisation personnelle et de valeurs démocratiques » observe-t-il.
« Au “mal vieillir” dans la solitude, la relégation et parfois avec le sentiment d’une indignité équivalente à une forme de mort sociale, est opposée l’exigence de nouvelles expressions de la solidarité nationale » affirme-t-il (cf. Fin de vie : “La peur ancestrale de la mort” serait-elle remplacée par la peur de la vieillesse ?) en saluant ici une « avancée sociale ».
Pour le professeur, les adaptations nécessaires au vieillissement doivent « se construire dans le cadre d’une stratégie envisagée avec la personne en y associant la diversité des expertises. »
« S’il est une ambition, elle doit être assumée à tous les niveaux de la vie sociale » insiste-t-il. « C’est à notre collectivité de comprendre le sens d’une mobilisation des solidarités et des compétences associant les personnes âgées à un projet politique qui intègre l’exigence éthique d’un vieillissement en société » conclut-il, tout en regrettant que le législateur n’ait pas été « plus ambitieux en termes de résolutions et de dispositifs effectifs ».
Source : Le Figaro, Pierre-Alexis Michau (13/04/2023)