iPS : une jeune femme diabétique produit sa propre insuline

Publié le 30 Sep, 2024

Une jeune femme de 25 ans atteinte de diabète de type 1 a commencé à produire sa propre insuline « moins de trois mois » après avoir reçu une greffe de cellules souches reprogrammées.

« Je peux maintenant manger du sucre », affirme la patiente qui réside à Tianjing et souhaite rester anonyme. Plus d’un an s’est écoulé depuis la transplantation. Pour James Shapiro, chercheur à l’université d’Alberta, au Canada, ces résultats sont « stupéfiants ». « Ils ont complètement inversé le diabète chez la patiente, qui nécessitait auparavant d’importantes quantités d’insuline », se réjouit le scientifique.

Les promesses des thérapies cellulaires

Cette étude, publiée dans la revue Cell [1], fait suite aux résultats d’une autre équipe de Shanghai qui a annoncé en avril avoir réussi à transplanter des îlots producteurs d’insuline dans le foie d’un homme de 59 ans atteint de diabète de type 2 (cf. Diabète : un patient guéri grâce à une thérapie cellulaire basée sur des iPS). Les îlots étaient également dérivés de cellules prélevées sur le corps du patient, qui a depuis cessé de prendre de l’insuline.

Le diabète touche « près d’un demi-milliard de personnes dans le monde ». La plupart d’entre elles souffrent de diabète de type 2, dans lequel le corps ne produit pas assez d’insuline, ou sa capacité à utiliser l’hormone diminue. Dans le cas du diabète de type 1, le système immunitaire attaque les cellules, des îlots de Langerhans, dans le pancréas.

Les cellules souches pouvant être utilisées pour faire croître n’importe quel tissu du corps et cultivées « indéfiniment » en laboratoire, elles offrent potentiellement « une source illimitée » de tissu pancréatique. En utilisant des tissus fabriqués à partir des propres cellules du patient, les chercheurs espèrent également éviter le recours aux immunosuppresseurs.

Des résultats « fascinants », mais à confirmer

Deng Hongkui, biologiste cellulaire à l’université de Pékin, et ses collègues ont prélevé des cellules de trois personnes atteintes de diabète de type 1, et les ont ramenées à un état pluripotent, à partir duquel elles peuvent être transformées en n’importe quel type de cellule de l’organisme (cf. Des cellules iPS humaines différenciées en cellules souches hématopoïétiques). Ils ont ensuite utilisé les cellules souches pluripotentes induites chimiquement (iPS) pour générer des « grappes d’îlots en 3D ». Ils ont testé la sécurité et l’efficacité de ces cellules sur des souris et des primates.

En juin 2023, au cours d’une opération qui a duré moins d’une demi-heure, ils ont injecté « l’équivalent d’environ 1,5 million d’îlots » dans les muscles abdominaux de la jeune femme. Habituellement, l’injection est effectuée dans le foie, mais les cellules ne peuvent pas y être observées. Ici, ils ont pu effectuer une surveillance par IRM. Deux mois et demi plus tard, la femme produisait suffisamment d’insuline pour vivre sans avoir besoin de compléments, et elle a maintenu ce niveau de production pendant plus d’un an.

Pour Jay Skyler, endocrinologue à l’université de Miami, ces résultats sont « fascinants », mais ils doivent être reproduits sur un plus grand nombre de personnes. Le médecin considère que la patiente sera « guérie » si la production d’insuline continue pendant 5 ans.

Cellules iPS vs embryonnaires ?

Par ailleurs, comme la patiente recevait déjà des immunosuppresseurs pour une précédente greffe de foie, les chercheurs n’ont pas pu déterminer si les cellules iPS réduisaient le risque de rejet du greffon. En outre, même si l’organisme ne rejette pas la greffe, parce qu’il ne considère pas les cellules comme « étrangères », il existe toujours un risque que l’organisme attaque les îlots de Langerhans chez les personnes atteintes de diabète de type 1. C’est la raison pour laquelle le professeur Deng explique essayer de développer « des cellules capables d’échapper à cette réponse auto-immune ».

Selon le chercheur, les résultats des deux autres participants sont « également très positifs ». Au mois de novembre, leur intervention datera d’un an. Le chercheur espère alors étendre l’essai à « 10 ou 20 autres personnes ».

Mettant en avant que les procédures impliquant les cellules iPS sont « difficiles à mettre à l’échelle et à commercialiser », des scientifiques développent des essais à partir de « cellules souches de donneurs ». Ainsi, Vertex Pharmaceuticals a publié les résultats d’un essai impliquant une douzaine de participants atteints de diabète de type 1 qui ont reçu des îlots dérivés de cellules souches embryonnaires (cf. Diabète et cellules souches embryonnaires humaines : un essai clinique non concluant).

NDLR : Les cellules souches embryonnaires sont issues d’embryons « surnuméraires » conçus dans le cadre de procédures de PMA et « donnés » à la recherche. Leur utilisation conduit à la destruction des embryons humains dont elles sont issues et ne saurait donc être considérée comme une alternative éthique à l’utilisation de cellules iPS (cf. Recherche sur l’embryon : pour quoi ?).

 

[1] S. Wang et al., Transplantation of chemically induced pluripotent stem-cell-derived islets under abdominal anterior rectus sheath in a type 1 diabetes patient, Cell 187, 1–13 (2024). DOI: 10.1016/j.cell.2024.09.004

Source : Nature, Smriti Mallapaty (26/09/2024)

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