A l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la douleur, la SFETD[1] a publié un Livre Blanc de la douleur : « Au moins 12 millions de Français souffrent de douleurs chroniques », s’alarment les médecins qui réclament une véritable reconnaissance du travail médical autour de la douleur.
Plusieurs constats alarmants : « Au total 30% des patients douloureux chroniques reçoivent le traitement approprié et moins de 3% d’entre eux sont pris en charge dans des centres spécialisés ». « Le délai d’attente pour l’accès à une structure spécialisée dans la prise en charge de la douleur est d’environ 2 à 26 semaines ». Selon la SFETD qui se base sur « une étude réalisée sur plus de 50.000 personnes en France publiée en 2004 », « 8,4 millions de Français pourraient moins souffrir s’ils étaient mieux pris en charge ». Des chiffres qui « restent d’actualité en 2017, puisque rien n’a vraiment changé depuis ».
Selon, le professeur Serge Perrot, président de la SFETD, « ni Nicolas Sarkozy ni François Hollande n’ont repris le flambeau. Le premier s’est concentré sur les économies à appliquer à l’hôpital, tandis que le second s’est attaché à la fin de vie. Toutes les avancées ont été balayées comme s’il s’agissait de dépenses inutiles ». « Il est incontestable qu’au début des années 2 000, d’importants progrès ont été réalisés dans ce domaine », notamment avec les trois plans douleurs, dont le dernier date de 2006-2010. Depuis, « il n’y a pas eu grand-chose », s’insurge-t-il.
« La douleur constitue le premier motif de consultation, dans les services d’urgences et chez le médecin généraliste », rappelle-t-il. « Aussi, nous appelons le gouvernement actuel à relancer un plan d’envergure. Au printemps, une stratégie nationale de santé sera mise en place, la douleur doit en faire partie. » Il rappelle qu’« une douleur non prise en charge peut entraîner des conséquences graves », comme par exemple chez les patients de cancer. « La prise en charge de la douleur peut allonger l’espérance de vie de 3 à 6 mois pour les cancers à un stade avancé. De plus, la douleur doit être considérée comme un facteur de risque dans certains cas, notamment chez les patients aux douleurs chroniques, au même titre que l’alcool, le tabac ou le stress. »
Le président de la SFETD demande que l’état reconnaisse « la médecine de la douleur » comme « un vrai corpus universitaire. Non plus, comme un petit cursus de vingt heures réunies à la fin de la sixième année d’études ». Selon lui, il faudrait « que la douleur soit reconnue comme une spécialité médicale » car « cela soulagerait les urgences et les généralistes. Puisqu’on veut augmenter l’ambulatoire pour réduire les coûts, autant donner aux médecins de ville la possibilité de soigner correctement la douleur ». En outre, SFETD recommande que la douleur chronique « soit reconnue comme une maladie ».
La bonne prise en charge de la douleur « serait une révolution éthique », conclut-il, « car la douleur est aussi synonyme de souffrance, qu’elle soit psychique, sociale, et existentielle : près d’un patient douloureux sur trois estime que la douleur est parfois tellement forte qu’il ressent l’envie de mourir ».
Pour aller plus loin :
Soins palliatifs : des thérapies complémentaires à domicile pour lutter contre la douleur
L’euthanasie, une “distraction médiatique” qui éloigne des véritables enjeux de la fin de vie
[1] Société française d’étude et de traitement de la douleur.
Huffington Post, Annabel Benhaiem (17/10/2017) ; Le généraliste (17/10/2017)
Image : Pixabay/DR