La question de l’arrêt volontaire de l’alimentation et de l’hydratation (VSED en anglais pour Voluntarily Stopping Eating and Drinking) est apparue dans un contexte où l’euthanasie et le suicide assisté sont légaux « dans des dizaines de juridictions à travers le monde ». Mais où « de nombreuses personnes qui veulent mettre fin à leur vie ne répondent pas aux critères d’éligibilité stricts définis dans la législation sur l’euthanasie et le suicide assisté ».
L’arrêt volontaire de l’alimentation et de l’hydratation désigne « l’action d’une personne compétente, capable, qui choisit volontairement et délibérément d’arrêter de manger et de boire dans l’intention première de hâter la mort parce que des souffrances inacceptables persistent ». Les patients qui choisissent d’y recourir « reçoivent souvent des soins palliatifs » procurés par un professionnel de la santé. Et pour certains, il s’agit d’« une alternative légale à l’euthanasie pour les patients qui souffrent de manière insupportable mais qui ne sont pas en phase terminale ou qui, pour une autre raison, ne remplissent pas les critères d’éligibilité pertinents pour l’aide à la mort ».
Ainsi, la VSED devient « de plus en plus courante et acceptée dans certaines juridictions ». Dans un article publié dans the Annals of Palliative Medicine, des chercheurs de l’université britannique de Lancaster affirment que cette pratique est autorisée sur le plan légal aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou encore en Australie, relevant que « peu de précédents juridiques pertinents ont été établis, que ce soit en ce qui concerne les patients qui l’entreprennent ou les médecins qui aident les patients ». Une loi de l’Etat du Nevada adoptée en mai 2019 autorise la rédaction de directives anticipées en cas de démence pouvant stipuler « que les prestataires de soins doivent cesser d’administrer des aliments ou des liquides par voie orale ». Pour les auteurs de l’article, l’arrêt volontaire de l’alimentation et de l’hydratation pourrait ainsi de fait « être plus courant que les formes de suicides assistés par un médecin, simplement parce qu’il ne fait pas l’objet d’un examen juridique approfondi ».
Mais tout n’est pas toujours simple. Dans l’Etat de Victoria en Australie, un homme de 71 ans devenu paralysé et souffrant d’« une grave déficience cognitive » avait rédigé une directive anticipée indiquant que « tous les soins devaient être interrompus s’il se retrouvait dans un état de dépendance ». L’équipe médicale a donc cessé tout traitement et alimentation, alors même que cet homme « semblait accepter la nourriture » et avait une perspective de rétablissement partiel. Le patient est mort au bout de quatre jours, ainsi que le détaille l’article du Medical Journal of Australia rédigé par des médecins exerçant en soins palliatifs.
Sur le plan juridique, il n’existe pas de consensus sur le sujet. Pour les juristes du Thaddeus Pope et Lindsey Anderson en Australie, le VSED « n’est pas une forme de suicide assisté car il n’implique pas l’administration ou la dispense d’un médicament mortel par un professionnel de la santé », ainsi qu’ils l’affirment dans un article publié dans le Social Science Research Network. A l’inverse, Lynn Jansen, chercheur au Saint Vincent’s Hospital and Medical Center à New-York, et le Dr Daniel Sulmasy, du Kennedy Institute of Ethics, affirment dans un article publié dans the Annals of Internal Medicine que, même s’« il est permis à un médecin de soutenir le choix d’un patient de refuser un traitement, y compris la nutrition et l’hydratation, lorsque ces soins sont vains », « de nombreux cas de VSED équivalent à un suicide, en particulier lorsqu’un patient n’est pas en phase terminale ». « Les médecins ne devraient donc pas recommander aux patients le VSED comme étant une option. »
Pour aller plus loin :
Dans l’Etat de Victoria en Australie, l’escalade des demandes d’euthanasie
BioEdge, Xavier Symons (20/06/2020)