Après sa saisine par le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom), le Conseil d’Etat a soumis le 12 juin une question prioritaire de constitutionnalité sur les modalités d’accès au dossier médical partagé (DMP) et les « imprécisions de la loi quant aux garanties apportées ».
« Rien n’est clair »
Le secret des données de santé est « mis à mal par ces modalités d’accès », déplore l’Ordre des médecins par la voix de son avocat, Me Loïc Poupot. Il explique que « par un mécanisme de renvoi », l’article L 1111-17 du Code de la santé publique autorise l’accès à des personnes qui ne sont pas des professionnels de santé mais peuvent « participer à la prise en charge des patients », comme les personnels sociaux et médico-sociaux. Or, ces personnes ne sont pas soumises au secret médical. « Si on admet le principe d’accès à ce type d’information, il faut des garanties strictes qui n’existent pas actuellement dans la loi, du moins rien de clair », plaide l’avocat.
Il souligne aussi la question du recueil du consentement vis-à-vis de ces professionnels, et pointe « l’absence de précisions au niveau de la loi sur la nature et le volume des données recueillies et sur la durée de conservation ».
« Un motif d’intérêt général » ?
« Cet élargissement poursuit un motif d’intérêt général de coordination qui justifie ces nouvelles dispositions », veut faire valoir de son côté Benoît Camguilhem, chargé de mission pour les questions prioritaires de constitutionnalité au secrétariat général du Gouvernement
Le législateur a prévu « “des garanties suffisantes” sur le recueil et la délimitation des accès », considère-t-il. Le respect du consentement serait « assuré par l’information de l’ouverture de Mon espace santé ». Or, « Mon espace santé » est ouvert automatiquement aux assurés sauf opposition expresse (cf. « Mon espace santé » : le lancement du dossier médical numérique sous consentement présumé).
Benoît Camguilhem affirme également que « les professionnels n’ont connaissance que des informations nécessaires à la coordination ». « Il s’agit d’un accès partiel dans la stricte limite de son rôle dans sa prise en charge fixée par une matrice d’habilitation. » Et « l’ensemble des professionnels sont tenus au respect du secret médical ».
La décision du Conseil constitutionnel est attendue le 12 septembre 2024.
Source : Hospimedia, Géraldine Tribault (18/07/2024)