Martine Pérez, rédactrice en chef, chargée du service Sciences et Médecine au Figaro évoque les dangers de la médecine prédictive.
James Watson, co-découvreur de l’ADN, a accepté l’année dernière que soit séquencée et publiée dans la revue Nature l’intégralité de ses propres gènes à l’exception d’un, dont il sait qu’il peut prédisposer à la maladie d’Alzheimer. Sa grand-mère étant morte de cette maladie, il s’est opposé à découvrir ses propres risques. Il savait que s’il était porteur de la maladie, la médecine ne lui serait pour l’instant d’aucun secours faute de traitement.
Depuis une dizaine d’année la médecine prédictive se développe grâce à la génétique et à l’imagerie. Or la prédiction d’une maladie n’a de sens que si un projet de prévention ou de traitement existe. Sinon, cette médecine ne peut que générer de l’angoisse face à l’avenir. Lorsque les maladies sont monogéniques, un seul gène suffit à l’apparition de la maladie. La médecine prédictive vise dans ce cas à faire un diagnostic au niveau de l’embryon pour empêcher la naissance d’un enfant malade ou gravement handicapé. Mais la majorité des gènes des maladies courantes comme le diabète ou la maladie Alzheimer ne peuvent apporter qu’une prédisposition à la maladie qui, de plus, est modérée par l’environnement.
Malgré cela de nombreuses entreprises offrent la possibilité via internet de faire ces tests. « Mais personne n’assure le service après vente», déplore la journaliste. Les médecins traitants voient de plus en plus de patients rongés par l’inquiétude.
Pour Ségolène Aymé, médecin généticienne, experte auprès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et responsable du réseau Orphanet (maladies rares), « il n’est pas éthique de dépister quand on n’a rien à offrir en termes de prévention ou de thérapie. Vous obscurcissez l’avenir sans apporter de solution ».
Le Figaro (Martine Pérez) 04/10/08 – Ouest-France.fr (Philippe Richard) 06/10/08