Médecine de précision : le gène qui cache la forêt ?

Publié le 11 Sep, 2023

Après 13 ans de recherche et 2,7 millliards de dollars, the Human Genome Project annonçait en 2003 avoir cartographié notre ADN, « ouvrant la voie à une nouvelle ère d’une médecine qui procurerait “le bon traitement, au bon patient, au bon moment” » (cf. Human Genome Project : la carte complète dévoilée). Pourtant, 20 ans plus tard, l’avènement de l’« âge de la médecine de précision » fait débat.

Les gènes monopolisent l’attention

Pour certains médecins et chercheurs, comme pour le professeur James Tabery, philosophe des sciences et de bioéthique à l’université de l’Utah et auteur de Tyranny of the Gene: Personalized Medicine and Its Threat to Public Health, on accorde trop d’importance aux gènes et pas assez à notre environnement ou à notre mode de vie. Avec des attentes trop grandes.

Au début du Human Genome Project, les généticiens pensaient que les êtres humains possédaient « peut-être 100 000 gènes » et que des pathologies comme le diabète, la maladie de Parkinson, le cancer ou même le vieillissement étaient causées par des variations sur seulement un ou deux d’entre eux. Finalement, le projet a permis de découvrir que « nous ne disposons que d’environ 20 000 gènes », « ce qui rend plus probable que les maladies soient causées par des combinaisons complexes de dizaines, voire de centaines de gènes ».

Une médecine du petit nombre ?

Le Pr Tabery doute que la médecine de précision puisse aider la majorité des gens. D’ailleurs le terme a remplacé celui de « médecine personnalisée » qui risquait d’induire les gens en erreur, pointe le professeur Mark Caufield, ancien directeur du 100 000 Genome Project (cf. Royaume-Uni : le génome de 100 000 bébés bientôt séquencé).

En outre, ces recherches nécessitent « de très nombreuses ressources ». Des sociétés pharmaceutiques investissent parfois des milliards pour développer un nouveau traitement. S’il ne s’adresse qu’à un petit nombre de patients, elles doivent rentabiliser leurs investissements en le facturant à des prix élevés (cf. Dystrophie musculaire : une thérapie génique approuvée par les experts de la FDA), ce qui peut induire un nouvel « effet secondaire » : la « toxicité financière ».

Une question de rentabilité ?

Quand le traitement est pris en charge par le système de santé, les patients non concernés peuvent en pâtir, pointe Mark Sculpher, directeur du Center for Health Economics de l’Université de York, car les ressources sont limitées. Ainsi l’impact global sur la santé de la population générale peut s’avérer négatif, estime-t-il.

Pour Nigel Paneth, professeur émérite d’épidémiologie, de biostatistique et de pédiatrie à la Michigan State University, si l’objectif est d’améliorer la santé publique dans son ensemble, les ressources pourraient être mieux allouées (cf. Jacques Testart : « Le Téléthon, c’est quelque chose qui me choque beaucoup »). « Nous avons réduit les taux de mortalité par maladies cardiaques de 70 à 80% aux Etats-Unis au cours des 50 dernières années », et « rien de tout cela n’est dû à quoi que ce soit de génétique », affirme-t-il. « Si vous regardez les ressources consacrées au programme de génomique, elles sont très, très importantes, mais avec très peu de rendement. »

 

Source : The Guardian, Ned Carter Miles (09/09/2023)

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