Aux Pays Bas, en 2019, le psychiatre Albert Batalla est sollicité pour donner un second avis sur une demande d’euthanasie. Il reçoit un dossier médical indiquant que le patient souffre d’hallucinations psychotiques depuis 8 ans. Les traitements délivrés au patient n’ayant produit aucune amélioration, le malade demande à mourir pour être délivré de ses hallucinations.
La Levenseindekliniek, le « Centre d’expertise pour l’euthanasie » de La Haye, le prend en charge et conclut, après un an de traitements infructueux, que les souffrances du malade sont insupportables et sans issue. Pour permettre au patient d’être euthanasié, un second avis médical est toutefois nécessaire. Le malade est alors adressé au Centre Médical Universitaire d’Utrecht, spécialisé en traitement des psychoses. Le Dr Batalla qui exerce dans cet établissement comprend rapidement que le malade ne souffre pas d’hallucinations, mais bien d’obsessions. Il prescrit un nouveau traitement, dont les effets positifs se font ressentir au bout de deux jours. Libéré d’un poids qu’il trainait depuis longtemps, le patient souhaite désormais vivre.
Le Dr Batalla et son confrère Sisco van Veen concluent « qu’il faut toujours rester critique et prudent par rapport au diagnostic établi par les confrères, en particulier lorsqu’il s’agit d’une euthanasie pour souffrances psychiques ». Alors qu’aux Pays-Bas et en Belgique, les malades psychiatriques sont de plus en plus nombreux à être euthanasiés, on doit se demander si « la psychiatrie est assez précise, mesurable, pour prendre avec assez de certitude une décision aussi radicale? » Bien souvent les médecins ne savent « tout simplement pas si un patient peut aller mieux ou non ». Et parfois la demande d’euthanasie n’est qu’un symptôme de la maladie, comme c’est le cas pour les dépressions. « Le noyau dur de la psychiatrie est de dire au patient : je vais t’aider, je ne te laisse pas tomber », c’est donc tout l’inverse de l’euthanasie.
De plus, rendre un avis sur une demande d’euthanasie est un processus « violent » pour le médecin, « surtout en psychiatrie, parce que vous tuez quelqu’un qui est physiquement en bonne santé ». Un collègue leur a confié : « c’est comme faire partie d’un peloton d’exécution ».
Pour aller plus loin :
Pays-Bas : un pas plus loin vers l’euthanasie des patients déments ?
Euthanasie : l’objection de conscience du médecin pas toujours comprise
Institut Européen de Bioéthique, C. de Bus (27/02/2020)