Tests génétiques et individualisme

Publié le 9 Jan, 2009

La Croix consacre un dossier aux tests ADN et en particulier à la loi sur le regroupement familial, votée il y a un an mais toujours pas rentrée en application. Professeur de philosophie à la faculté de Marseille et vice-président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), Pierre Le Coz s’inquiète, au-delà de la législation sur les tests ADN pour les étrangers, de la multiplication du recours privé aux tests ADN.

"Nous avons perdu notre innocence génétique" (n’apprend-on pas en cours de "sciences de la vie" que "la vie et les hommes ne sont rien de plus que des assemblages de particules matérielles" ?), constate Pierre Le Coz pour qui notre culture individualiste fait le lit du développement incessant de la génétique. "Soyons lucides, les généticiens ne parviendront pas à inverser la tendance" ; "ils auront beau déployer des trésors de pédagogie pour que leurs découvertes ne soient pas grossièrement simplifiées, marteler que l’ADN ne renferme qu’une toute petite partie de notre destinée, nous mettre en garde contre la confusion entre prédisposition et prédestination, nous rappeler que la génétique n’est pas une astrologie scientifique, qu’une maladie d’origine génétique ne se déclare qu’avec le concours de plusieurs gènes, en interaction avec son milieu…", "les inconditionnels du "moi" que nous sommes devenus n’en retiendront que ce qui les intéresse : lorsqu’on a un souci de santé, il y a toujours un petit quelque chose à la base…".

Or, c’est bien ce "petit quelque chose" qui a ouvert certains appétits économiques… Ainsi les entreprises de "génomique personnelle" se multiplient-elles, offrant à ceux qui le souhaitent, moyennant quelques centaines d’euros d’"explorer leur univers intérieur" et de "trouver les clés de leur destin".

L‘auteur en appelle donc aux professionnels et aux pouvoirs publics à qui il incombe d’"alerter l’opinion sur les risques d’escroquerie que comporte ce business du gène". Au-delà de cet appel à la vigilance, ne pourrions nous pas aller plus loin et envisager une législation internationale qui encadrerait ce nouveau business ? Mais comment empêcher les gens d’accéder à leur "moi génétique" ? "Notre culture individualiste est axée sur la connaissance de soi et l’autonomie", "quelles valeurs peut-on dorénavant lui opposer ?", s’interroge l’auteur qui estime enfin qu’"il est illusoire de croire que les Etats parviendront à s’entendre sur la rédaction d’un texte universel qui édicterait le permis et le défendu en matière de génétique".

La Croix (Bernard Groce, Reinnier Kazé, Sébastien Maillard, Pierre Le Coz) 10&11/01/09

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