PMA post-mortem : vers un recours contre « une jurisprudence revenant à encourager des Français à recourir à des pratiques prohibées »
Dans une décision rendue ce mardi 14 octobre, la Cour d’appel de Paris a reconnu des liens de filiation et droits successoraux dans le contexte de deux PMA réalisées post-mortem, c’est-à-dire effectuées après le décès du père.
En effet, deux femmes ont demandé de reconnaître, en France, la filiation paternelle d’enfants conçus en Espagne via une PMA post-mortem. Si en Espagne ce type de PMA est légal, ce n’est pas le cas dans l’Hexagone. La loi bioéthique de 2021 a en effet confirmé que le décès d’un membre du couple faisait « obstacle » à l’insémination ou au transfert d’embryon. L’article L. 2141-2 du code de la santé publique indique ainsi que « le projet parental d’un couple s’éteint avec le décès de l’un de ses membres ». Autrement dit, la PMA post-mortem est illégale en France et « les juges français [avaient] jusqu’ici suivi une ligne constante » (cf. PMA post-mortem : le Conseil d’Etat valide l’interdiction française).
« Une atteinte disproportionnée au droit au respect à la vie privée de l’enfant »
La Cour d’appel de Paris motive sa décision relative au cas d’une petite fille née de cette pratique en estimant que le refus d’établir cette filiation porterait « une atteinte disproportionnée au droit au respect à la vie privée de l’enfant » (cf. PMA, GPA post-mortem : naître orphelin).
Dans cette même décision, un deuxième cas était exposé aux juges de deuxième instance : la reconnaissance ou non d’un droit successoral pour l’enfant né d’une PMA post-mortem. Là aussi, malgré le droit français en vigueur, la Cour a considéré que « la différence de traitement entre lui et les autres enfants de son père, qu’il s’agisse de ceux issus d’une première union, ou de sa sœur, née du vivant de l’époux du même processus de PMA pratiquée en Espagne » caractérise « une atteinte disproportionnée à ses droits ». Reconnaissant « en creux » la filiation.
« Comme on ne peut pas faire un enfant avec un défunt, on ne peut pas non plus faire un enfant par PMA avec un défunt »
Pour le pédopsychiatre Pierre Lévy-Soussan, cette pratique « condamne un enfant à avoir un géniteur mort avant sa conception. Sur le plan de la filiation, c’est un récit traumatique. Sur le plan éthique, c’est un refus des limites. Il y a des butées qui sont importantes car elles sont structurantes ».
Le Syndicat de la famille dénonce quant à lui le fait que ces décisions « aboutissent à accepter une pratique illégale en France ». Or il en va du respect de l’intérêt supérieur de s’enfant. La justice ne doit pas créer « une jurisprudence revenant à encourager des Français à recourir à des pratiques prohibées », en se rendant à l’étranger. « Comme on ne peut pas faire un enfant avec un défunt, on ne peut pas non plus faire un enfant par PMA avec un défunt » argumente-t-il. Ainsi, le Syndicat de la famille exprime sa volonté de former un recours contre ces décisions « pour sécuriser l’intérêt supérieur de l’enfant et le respect dû aux défunts ».
Vers un changement législatif ?
Certains défenseurs de la pratique, dont le collectif Bamp qui se définit comme une association de patients et d’anciens patients de l’aide médicale à la procréation, parlent d’« hypocrisie » et de « cynisme » dans la mesure où la lettre de la loi permet aux femmes de « faire don de leurs embryons » pour dans le même temps « demander un don de sperme d’un inconnu ».
Pour ces raisons, le député socialiste Arthur Delaporte a indiqué avoir déposé une proposition de loi « visant à autoriser la procréation médicalement assistée de volonté survivante » pour faire évoluer la législation (cf. L’ANDDE : une association militante qui veut peser sur la prochaine loi de bioéthique).
Sources de la synthèse de presse : La Croix, Inès Simondi (14/10/2025) ; Le Monde avec AFP (14/10/2025) ; Aleteia, Louis de la Houplière (14/10/2025) ; Libération (14/10/2025) ; Le Syndicat de la famille (14/10/2025)